Grace et Gilbert, deux âmes pour un cœur

Alors que Pinky, son unique amie, vient de rendre son dernier souffle, Grace entreprend de raconter sa vie à un escargot qu’elle a nommé Sylvia. Elle revient d’abord sur l’enfance plutôt heureuse qu’elle a vécue auprès de son père et de son frère jumeau Gilbert. Grace raconte aussi comment, à la mort de son père, elle a été séparée de Gilbert par les services sociaux : un véritable déchirement pour ces jumeaux qui pensaient partager un seul cœur.

Au cours de sa vie semée d’embûches, Grace a tenté de s’aménager son propre refuge, notamment en cultivant son amour pour les escargots et en collectant toutes sortes d’objets, jusqu’à devenir kleptomane. Et si l’héroïne de Mémoires d’un escargot se souvient parfaitement de son passé douloureux, elle a beaucoup de mal à envisager un avenir meilleur. 

Réalisateur et scénariste du long-métrage, Adam Elliot nous plonge dans l’univers étrange de Grace avec un récit qui mêle le drame au burlesque. Le cinéaste n’est pas tendre avec ses protagonistes, qui reflètent la bizarrerie, la fragilité et la cruauté de l’espèce humaine. D’autre part, Mémoires d’un escargot aborde aussi des sujets difficiles comme le deuil, la santé mentale ou encore la solitude.

Pourtant, le récit est aussi empreint d’un humour qui vient désamorcer les moments les plus pathétiques de la vie de Grace. Adam Elliot signe ainsi une histoire qui offre l’équilibre parfait entre la compassion, la fantaisie et l’espoir, sans parler de son univers visuel impressionnant. 

La magie du stop motion pour raconter la résilience

Entièrement réalisé en stop motion et sans effets visuels numériques, Mémoires d’un escargot est un bijou d’animation. Outre le travail remarquable accompli pour créer un à un chaque personnage et élément de décor, on admire la dimension immersive de l’ensemble. Principalement fabriqué grâce à de l’argile, du fil de fer, du papier et de la peinture, l’univers de Mémoires d’un escargot regorge de détails et de visages très expressifs.

Avec leurs grands yeux cernés, leurs vêtements sombres et leurs teints pâles, Grace et Gilbert peuvent rappeler des personnages des films de Tim Burton. Aussi bien à travers son esthétique que les sujets qu’il aborde, le long-métrage d’Adam Elliot est teinté de nuances sombres et moroses. Pourtant, la générosité et la passion de l’artisanat irradient l’écran et viennent réchauffer ce camaïeu de gris, laissant même des traces d’empreintes humaines dans l’argile. 

Adam Elliot utilise le stop motion pour raconter les difficultés, les imperfections et les failles de ses personnages, à travers une histoire profonde. Il embrasse la lenteur de l’escargot pour donner à Grace le temps de traverser toutes les épreuves de sa vie et de trouver, au bout de son malheur, sa place dans ce monde cabossé. 

Pour guider son héroïne et le spectateur, le cinéaste ne manque pas d’intégrer un personnage salvateur et attachant à son histoire : Pinky, une octogénaire excentrique qui semble avoir vécu mille vies. Car Mémoires d’un escargot est aussi un film sur la résilience, qui encourage tout un chacun à regarder vers l’avant, même quand le sort s’acharne. Et en choisissant l’escargot, un animal associé à la patience et à la persévérance, comme totem pour son héroïne, Adam Elliot lui promet un avenir meilleur. 

Marie Serale | @marie_srl

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