The Green Knight : un voyage onirique dans la légende arthurienne
On ne l’attendait pas sur ce terrain : David Lowery s’est lancé en 2018 dans l’adaptation moderne d’un poème du 14ème siècle tout droit issu de la légende arthurienne, intitulé « Sir Gauvain et le Chevalier Vert ». Partie intégrante de la nouvelle vague du cinéma indépendant américain aux côtés de Robert Eggers et Ari Aster, David Lowery s’est une nouvelle fois associé au studio A24 pour The Green Knight, un film attendu au tournant après avoir subi de nombreux retards et un remontage complet après le début de la pandémie. Le film ne sortant pas en salles en France, il est à voir depuis le 3 janvier dernier sur la plateforme de SVOD Prime Video.
Un récit fondateur
On y suit l’histoire de Gauvain, neveu du roi Arthur, mais pas encore Chevalier de la Table ronde, qui est présenté ici sous un jour oisif et hédoniste. Si son appartenance familiale le destine à de grandes choses, il ne peut faire état d’aucun fait d’armes. Mais quand un mystérieux Chevalier Vert fait irruption dans la salle du trône pendant les festivités de Noël, Gauvain accepte son défi : celui d’asséner un coup d’épée à l’énigmatique chevalier en acceptant que ce dernier le lui rende, un an jour pour jour, dans une lointaine Chapelle Verte.
Le film offre ici une relecture personnelle d’une des histoires les plus emblématiques du mythe arthurien, qui porte avec elle tout un folklore celtique entre épopée médiévale et magique. L’histoire du Chevalier Vert a déjà été adaptée au cinéma et à la télévision, mais se voit insuffler ici une tonalité radicalement différente par David Lowery, qui s’en inspire pour mieux se l’approprier. Nous voguons ici aux confins de la dark fantasy, où l’épique laisse place à l’onirique. Dans ce voyage initiatique d’un personnage en quête d’honneur, Gauvain fera des rencontres et traversera des épreuves qui testeront ses qualités de chevalier : le courage, la générosité, la courtoisie, la piété et la chasteté.

Une quête métaphysique et onirique
The Green Knight se raconte à travers les yeux, et l’esprit, de Gauvain. En sa qualité de narrateur non fiable, il nous fait constamment douter de la véracité de ses péripéties qui lorgnent du côté du rêve ou de l’hallucination. Le futur chevalier se lance dans une véritable exploration morale, une quête de soi qui va le confronter à des questions métaphysiques qui le dépassent. La mort et le temps qui passe planent encore sur le cinéma de David Lowery, qui arrive encore une fois à susciter un vertige existentiel aux spectateurs, notamment dans le dernier acte du film.
À l’instar du poème originel (encore étudiée par les chercheurs aujourd’hui), The Green Knight est un récit complexe aux multiples strates d’interprétations. C’est aussi une oeuvre visuellellement captivante aux images mémorables portée par une esthétique picturale de tous les instants. On sort ainsi de la fable arthurienne pour s’immerger dans un univers cryptique presque insondable. The Green Knight reste un film accessible et fascinant, qui n’hésite pas à livrer ses réponses aux esprits les plus attentifs sans ambiguïté démesurée. Le film se prête d’ailleurs à l’exercice de multiples visionnages, incités par la disponibilité immédiate du film en streaming, timide consolation de ne pas avoir pu le découvrir sur grand écran.

On attend désormais David Lowery sur les terrains de la science-fiction et surtout, de l’horreur, un genre qui transpire ici et qui aura toute l’attention du réalisateur si l’on en croit ses déclarations en interview. En attendant, plongez dans The Green Knight, vous ne regretterez pas le voyage.
Hugo Cléry | @HugoClery