Le monde après nous : un drame social sur la jeunesse débrouille à Paris

Date de publication : 02.05.22

Présenté à la Berlinale en 2021, Le Monde après nous est le premier long-métrage de Louda Ben Salah-Cazanas, un drame social teinté de comédie qui dresse le portrait d’une certaine jeunesse déboussolée. Film politique s’il en est, il s’agit avant tout d’une histoire d’amour noyée dans les galères, surtout financières, mais aussi morales.

 

Génération débrouille

On suit Labidi : sa famille est à Lyon, sa carrière est à Paris mais son coeur est en Algérie. Il est monté à la capitale avec l’objectif précis de publier son premier roman sur la guerre d’Algérie, fortement inspiré par la vie de son père. Alors qu’il décroche un contrat avec une maison d’édition, il devra écrire et s’en sortir dans une capitale toujours plus onéreuse. Vivant au-dessus de ses moyens, mais au niveau de ses ambitions, Labidi va vouloir concilier sa toute nouvelle vie de couple (avec Elisa, une jeune étudiante dont il est tombé éperdument amoureux) avec son rêve littéraire.

Génération débrouille

En surface, le film fait le portrait d’une génération débrouille, celle pour qui partager une chambre de bonne en colocation est une nécessité, celle qui enchaîne les petits boulots précaires pour payer son loyer. Si le film s’efforce de montrer la dure réalité pour toute une partie de cette jeunesse, il le fait sans misérabilisme aucun grâce à la force de caractère de Labidi. Malgré l’accumulation d’obstacles qui se dressent sur son chemin, il tient à garder la tête haute, à faire illusion devant ses parents à qui il cache ses problèmes d’argent. “T’inquiète, je gère” n’aura jamais été aussi dénué de vérité. 

Transfuge de classe

Le monde après nous est aussi l’histoire d’un “transfuge de classe” comme Labidi s’identifie lui-même. Celle d’un auteur débutant qui espère faire carrière en racontant les origines d’une famille qu’il n’a pas connues, mais qui trouvera dans sa vie présente une source d’inspiration bien plus fertile. En habitant dans un appartement central avec des moulures au plafond, en travaillant pour un lunettier bobo comme il en existe tant dans la capitale, il ressemble à un agent infiltré. Mais ne perdant jamais sa cible de vue, ces obstacles ne sont finalement que passagers. Cette vie parisienne n’est qu’une étape, à première vue. Mais une étape fondatrice.

Transfuge de classe

Film court mais intense, Le monde après nous jongle avec différentes tonalités sans jamais perdre le cap de son sujet. Grâce à ses respirations légères et sa mise en scène intimiste, cette histoire d’un tragique omniprésent arrive à nous toucher en plein coeur. 

Nous nous sommes entretenus avec le réalisateur du film, Louda Ben Salah-Cazanas, ainsi que Louise Chevillotte, qui incarne Elsa. Les deux nous parlent du lien très personnel qu’ils entretiennent avec l’histoire du film, quasi-autobiographique pour le réalisateur. On y apprend aussi que jouer les livreurs Deliveroo à Paris n’est pas une mince affaire !