Megalopolis, ou le film-somme de Francis Ford Coppola
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De Thibaud Gomès-Léal
60 ans de carrière, 23 longs-métrages, cinq Oscars, deux Palme d’or, et une empreinte indélébile laissée sur l’histoire : Francis Ford Coppola est sans doute mieux résumé par ses propres films que par une simple liste. Le cinéaste s’est d’ailleurs lui-même pris au jeu de l’introspection dans son dernier opus, Megalopolis, œuvre-somme qui encapsule tout son cinéma. Analyse.
Le projet d’une vie
En gestation dans l’esprit du réalisateur depuis plus de 40 ans, Megalopolis raconte l’histoire d’une New York futuriste (rebaptisée New Rome) victime d’un désastre, et qui va mettre face-à-face un architecte (Adam Driver) souhaitant reconstruire la ville en modèle utopique, et un maire conservateur (Giancarlo Esposito) favorable à un statu-quo mortifère. Une variation de la chute de l’empire romain teintée de science-fiction, que Coppola utilise pour mieux questionner ses thèmes de cœur : la famille, le spectacle, l’Amérique, le pouvoir et sa corruption… et la course inéluctable du temps.
Il est ainsi difficile de ne pas penser à la trilogie du Parrain (dont les films sont sortis respectivement en 1972, 1974 et 1990) face au parcours de Julia Cicero (Nathalie Emmanuel) dans Megalopolis, tiraillée entre son amour pour Cesar Catilina (Driver) et son devoir envers sa famille et son père (Esposito), ainsi que ses propres aspirations. Une trajectoire qui rappelle bien sûr celle de Michael Corleone, dont les ambitions nobles et patriotiques se trouvent finalement remplacées par les obligations liées à son héritage. Une idée corrélée à l’histoire de l’Amérique elle-même.
“I Believe in America”
Car s’il y a un sujet que le cinéaste italo-américain adore disséquer, c’est bien son pays natal. Le fameux “Land of Opportunity” que Coppola a vu passer à l’écran de la Seconde Guerre Mondiale (il remporte un Oscar pour le scénario de Patton en 1970) à la Guerre du Vietnam (Apocalypse Now, 1979), en passant par la paranoïa des années Nixon (Conversation Secrète, 1974).
Au-delà d’être le simple témoin de son époque, le réalisateur a remis en cause les fondements mêmes du “rêve américain”, que ce soit en traitant de la question raciale via le microcosme du Cotton Club (1984), ou en tordant le coup au fantasme de l'entreprenariat et du capitalisme (Tucker : L’homme et son rêve, en 1988).
Dans Megalopolis, c’est une Amérique trumpienne (anachronisme visionnaire quand on sait que le scénario du film a été finalisé il y a une décennie), grotesque et bardée d’or que Coppola pointe de sa loupe. Le cinéaste qui a traversé le tumultueux XXe siècle de son pays y interroge cette fois l’avenir : déchiré par les inégalités, dirigé par une aristocratie toujours plus absurde, l’empire américain est-il arrivé en bout de course, tout comme Rome en son temps ?
Arrêter le temps
“Je suis vieux. Je veux raconter des histoires, mais je n’ai plus le temps”. À l’instar de Martin Scorsese, auteur de cette déclaration, Francis Ford Coppola est pris par le temps. Une thématique récurrente chez le cinéaste, puisqu’on la retrouve dans Peggy Sue s’est mariée (1986), dans lequel Kathleen Turner revit sa jeunesse, dans Dracula (1992) et son protagoniste central immortel, dans Jack (1996) avec son héros atteint du syndrome de Werner ou encore dans le méconnu L’Homme sans âge en 2007, dans lequel le personnage joué par Tim Roth se voit rajeunir et a le droit ainsi à “une deuxième vie”.
Dans Megalopolis, le réalisateur revient une nouvelle (et dernière ?) fois à cette idée forte, et à ces décisions qui façonnent une vie, une nation, une civilisation. Adam Driver y contrôle littéralement le temps, et se bat pour créer encore et toujours son utopie irréalisable. Le personnage s’impose en incarnation de Francis Ford Coppola qui, par le fait même de réaliser des films, suspend le temps à sa manière. Tel un grand maître des horloges pas encore prêt à passer la main.
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