Tropic : la dystopie selon Edouard Salier
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Lázaro et Tristán, jumeaux, ont un rêve : devenir astronautes. Soutenus par leur mère, prête à tous les sacrifices, ils intègrent une formation militaire, déterminés à atteindre leur objectif. Mais lorsque Tristán est victime d’un étrange accident qui le transforme radicalement, les espoirs se brisent. Après de multiples travaux audiovisuels (dont des courts-métrages et des clips musicaux) dans lesquels il a exploré et mis en images d’étranges mondes aux reflets dystopiques, Edouard Salier signe Tropic, son premier long-métrage. Entre symboles et références, comment le film concentre-t-il le parcours et l’univers du cinéaste ?
Puissance et vulnérabilité des corps
Il y a, dans Tropic, une représentation nuancée du corps humain, entre exigence et lâcher-prise, entre contrôle et fatalité. L’expérience de Lázaro et Tristán au sein du centre de formation militaire est aussi sensorielle que symbolique puisqu’elle donne à voir des corps qui se renforcent, repoussent leurs limites, des corps soumis à un idéal d’excellence.
Et alors que cette compétition physique et intellectuelle bat son plein, l’accident qui frappe Tristán semble rappeler la vulnérabilité du corps face à la nature et au cosmos. Contaminé par un résidu toxique dont la provenance est inconnue, le jeune homme est non seulement défiguré mais transformé mentalement. Si l’aspect monstrueux nous rappelle le body horror de David Cronenberg, Edouard Salier avait aussi exploré cette ambivalence du corps dans le clip de Love S.O.S. réalisé pour le groupe Justice. D’autre part, le choix de deux frères de fiction (interprétés par Pablo Cobo et Louis Peres) pour porter ce récit met en avant la manière dont on peut se ressembler (physiquement, mais pas que) et vouloir cultiver ses points communs, tout en ayant des destins très différents.
Mondes cosmiques
Si le cosmos et le voyage dans l’espace sont au cœur de Tropic, la seule représentation extraterrestre que l’on aperçoit dans le film est la lumière verte qui s’abat sur le lac où Lázaro et Tristán s’entraînent. Comme dans de nombreux films du genre, l’espoir d’une vie ailleurs que sur la Terre est l’un des éléments qui nourrit la dystopie d’Edouard Salier. Dans Tropic, les protagonistes rêvent d’explorer l’espace, sans savoir qu’une malédiction céleste va briser leurs projets. Là où les clips I’m Aquarius réalisé pour Metronomy et Civilization pour Justice mettaient en scène des mondes futuristes ou extraterrestres, le récit de Tropic s’ancre sur la Terre. La tension qui se propage tout au long du film s’appuie donc davantage sur des éléments comme l’intense musique originale de SebastiAn ou encore les relations entre les personnages, même si elle semble être régie par une force cosmique que l’on ne voit pas ou peu.
Tragédie, fatalité et malédiction
Avec Tropic, Edouard Salier met en scène une dystopie renforcée par le tragique. Si le long-métrage dépeint une société enlaidie par l’élitisme et la compétition, qui laisse peu de place à la différence, Tropic concentre son récit sur la complexité des relations intrafamiliales, impactées par la fatalité. On relève plusieurs inspirations et références qui nourrissent l’aspect tragique du film, à commencer par le demi-masque de protection sur le visage défiguré de Tristán qui n’est pas sans rappeler le théâtre et les tragédies grecques. Ce ton tragique peut aussi être deviné dès l’évocation du prénom de Lázaro, faisant écho à la résurrection de Lazare dans la Bible, mais aussi au syndrome de Lazare en psychologie qui désigne les difficultés rencontrées par une personne après avoir été confrontée à la certitude de sa propre mort. On peut donc imaginer dès le début du récit que le personnage de Lázaro va survivre à une épreuve terrible, en l'occurrence en étant épargné lors de l’accident, et disposer d’une seconde chance, celle de réaliser le rêve qu’il partageait avec son frère.
Savant mélange de références intégrées dans un univers singulier, Tropic questionne alors les notions de chance, de malédiction et de destin à travers la relation entre les deux frères. L’argument fantastique vient subtilement appuyer l’impuissance d’une famille qui voit ses espoirs brisés par la fatalité. Un premier long-métrage prometteur qui donne envie de continuer à suivre avec attention le travail d’Edouard Salier.
Marie Serale | @marie_serale
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