Virgin Suicides, le chef-d’oeuvre de Sofia Coppola est de retour au cinéma
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Plus de vingt années se sont écoulées depuis la présentation de Virgin Suicides, premier long-métrage de Sofia Coppola, à la Quinzaine des Réalisateurs en 1999 et sa sortie dans les salles de cinéma françaises en 2000. Les mélodies lancinantes composées par le duo français Air, l’univers visuel lumineux, le portrait mélancolique des cinq sœurs Lisbon : de retour au cinéma en juillet 2023, Virgin Suicides cueille les spectateurs fébriles avec une intensité qui a traversé les années. En plus de pouvoir admirer sa version restaurée 4K, voici pourquoi il faut absolument (re)découvrir le film au cinéma.
« Vous n’avez jamais été une fille de treize ans »
Ces mots prononcés par Cecilia, la cadette de la famille Lisbon, en réponse à un médecin qui lui explique qu'à son âge « on ne connaît pas encore les souffrances de la vie » cristallisent les tourments adolescents évoqués dans Virgin Suicides. Sofia Coppola adapte le roman de Jeffrey Eugenides, en tant que réalisatrice et scénariste, transposant ainsi à l’écran l’histoire des filles Lisbon, de la première tentative de suicide de leur petite soeur Cecilia, à la surprotection de leurs parents, jusqu’à l’ultime tragédie. Des écrits de Jeffrey Eugenides, la cinéaste conserve le dialogue fragmenté entre les filles Lisbon et les garçons de leur quartier, narrateurs de l’histoire. Elle apporte cependant une véritable relecture en s’intéressant davantage au point de vue féminin, là où le roman est fondé sur les suppositions et les fantasmes des jeunes garçons. Ce qui est présenté comme du mystère dans l'œuvre originale est révélé dans le film comme l’incapacité de l’entourage des héroïnes à les comprendre, ignorant chacun de leurs appels à l’aide.
Devenu un classique du cinéma américain des années 1990, Virgin Suicides est souvent réduit à un teen-movie. À l'époque, le film de Sofia Coppola est pourtant apparu en total décalage avec les films du genre, comme Clueless (1995) ou 10 bonnes raisons de te larguer (1999). En confrontant le point de vue de ces héroïnes adolescentes à une société hypocrite, Sofia Coppola met en lumière le sexisme qui les enferme, seules face aux contradictions de la puberté. Par ailleurs, la cinéaste donne une résonance toute particulière au propos en l’exprimant avec poésie, cruauté et ironie.
Un spleen aux couleurs pastel
Si Virgin Suicides ne cesse de nous hanter, c’est aussi grâce à son atmosphère visuelle si singulière où la douceur et la fantaisie contrastent avec l’intrigue tragique. En collaboration avec Edward Lachman, directeur de la photographie du film, Sofia Coppola nous offre des images inoubliables, qui reflètent avec justesse les états d’âmes des jeunes filles et saisissent des bribes malicieuses et poétiques de rêves, de pensées, de souvenirs. Tour à tour, les rayons du soleil, l’aube bleue ou la douce brume enveloppent l’image dans une harmonie parfaite. À l’image du mystère qui plane dans l'œuvre originale, les décors regorgent de symboles à déchiffrer. La caméra s’attarde à plusieurs reprises sur des recoins des chambres des jeunes filles, donnant ainsi à voir des pêle-mêle fascinants d’objets savamment agencés, du chapelet au rouge à lèvre. Si Sofia Coppola déclare s’être inspirée de Pique-nique à Hanging Rock de Peter Weir (1975) pour créer l’atmosphère de Virgin Suicides, on peut affirmer qu’elle y a déployé un langage inédit pour raconter la détresse adolescente.
L’éclosion d’une actrice et d’une cinéaste
Virgin Suicides est aussi porté par des interprétations d’une grande justesse comme celles de James Wood et Kathleen Turner, qui incarnent respectivement un père obsédé par la raison et une mère qui s’en remet à la religion, sans jamais saisir le langage de leurs propres filles. Hanna R. Hall, Leslie Hayman, Andrea Joy Cook et Chelse Swain interprètent Cecilia, Therese, Mary et Bonnie Lisbon avec grâce. Mais la révélation du film est Kirsten Dunst, qui, après des apparitions très remarquées au cinéma (dans Entretien avec un vampire en 1994 et dans Jumanji en 1995), embrasse son premier grand rôle sous la direction de Sofia Coppola. Kirsten Dunst incarne Lux Lisbon dans toutes ses contradictions, de la reine du lycée à la jeune fille tourmentée, avec un charisme rayonnant.
En plus d’être une adaptation remarquable qui confère de la justesse et de la profondeur au roman de Jeffrey Eugenides, Virgin Suicides marque l’éclosion d’une cinéaste. De Lick the star (1998), son tout premier court-métrage, à Marie-Antoinette (2006) Sofia Coppola dessine sa propre vision de l’ambivalence et de l'étrangeté de l’adolescence. Et si Virgin Suicides demeure son plus beau film à ce jour, le travail de la réalisatrice mérite toute notre attention. Elle sera d’ailleurs bientôt de retour au cinéma avec un biopic sur Priscilla Presley.
Marie Serale | @marie_serale
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