Sorry, Baby : le pouvoir essentiel du lien

Photo du film Sorry, Baby
© Mia Cioffi Henry, Project Alpha LLC

Date de publication : 25.08.25

Vainqueur du prix Waldo-Salt du scénario au Festival de Sundance et remarqué à la Quinzaine des Cinéastes, Sorry, Baby a révélé au public le talent d’Eva Victor en tant que cinéaste, scénariste et interprète. Dans ce premier long-métrage, elle joue le rôle d’Agnès, une jeune professeure en philosophie qui a subi un traumatisme. En trouvant un équilibre remarquable entre l’humour et le drame, le film s’intéresse à l’amitié précieuse que l’héroïne partage avec Lydie et à son importance dans son processus de guérison.

Sur le chemin de la réparation

Sorry, Baby dépeint un portrait intime d’Agnès, à travers différentes périodes de sa vie. Découpé en cinq chapitres, le film alterne des moments situés avant et après un bouleversement majeur dans la vie de l’héroïne, sans respecter la chronologie. La cause du traumatisme de la jeune femme, ce qu’elle appelle « something bad » (« quelque chose de grave »), est l’élément déclencheur du récit, sans pour autant en être le cœur. Dans Sorry, Baby, Eva Victor raconte avant tout la vie après une agression sexuelle, le long chemin vers la guérison, mais aussi l’importance du lien aux autres et à soi-même.

Dès le début du film, Agnès est présentée comme un personnage en décalage, figée dans le temps. Alors que son amie Lydie a emménagé à New York, s’est mariée et attend un bébé, l’héroïne vit toujours dans la maison qu’elles partageaient pendant leurs études et poursuit sa carrière à l’université où elle a rédigé sa thèse. Au fur et à mesure du film, on apprend à la connaître en appréciant son humour singulier, son goût pour la tisane ou les balades en forêt, et on chemine aussi avec elle dans un processus de réparation post-traumatique. Eva Victor nous présente un personnage magnifique dont elle incarne la sensibilité et la résilience avec une grande douceur. D’autre part, malgré la difficulté du sujet, la cinéaste parvient à atteindre un équilibre remarquable entre l’humour et le drame, ce qui confère au film une grande justesse, mais aussi une dimension réconfortante. 

Photo du film Sorry, Baby
© A24

Des liens salutaires 

La grande force de Sorry, Baby, c’est aussi sa façon de faire évoluer son héroïne à travers différents liens : le lien sororal qu’elle entretient avec Lydie et d’autres liens plus inattendus, mais tout aussi salvateurs, comme ceux qu’elle construit avec un chat ou le gérant d’une sandwicherie, rencontrés tous deux par hasard. Ce sont autant de liens qui accompagnent et aident l’héroïne de différentes manières, à différents moments de son parcours de guérison. Mais au-delà du lien aux autres, Sorry, Baby explore aussi le lien d’Agnès à elle-même, sa façon de renouer avec son propre corps et sa propre identité, au fur et à mesure qu’elle se reconstruit.

« Si le film n’est pas une tragédie, c’est parce que Lydie est là pour écouter Agnès. » a déclaré Eva Victor dans l’entretien publié dans le dossier de presse du film. En effet, la relation entre les deux femmes est le soleil qui illumine le récit tant elle est profondément saine, solide et rassurante. Lydie est là pour son amie, dès les premières heures qui suivent l’agression. Naomi Ackie interprète à merveille ce personnage tendre et compatissant, qui veille sur Agnès, sans s’oublier pour autant. Dans Sorry, Baby, l’amitié est représentée comme un refuge. Agnès et Lydie ont développé un lien si puissant qu’il se renforce avec le temps et touche même la fille de Lydie. Dans une scène bouleversante, Agnès regrette de ne pas pouvoir lui promettre la protection, mais lui offre l’écoute, la compréhension et un amour inconditionnel.

Sans jamais minimiser le vécu de son personnage, Eva Victor trace pour Agnès un chemin sinueux, mais lumineux vers la guérison, guidé par l’écoute et le rire. Elle nous offre ainsi un premier long-métrage d’une grande douceur, comme un cadeau précieux qui pourrait bien ne jamais nous quitter.


Marie Serale | @marie_srl

 

À lire aussi