Guillermo del Toro, pour l’amour du conte
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En plus de 30 ans de carrière et 12 longs-métrages, Guillermo del Toro s’est imposé comme l’un des cinéastes majeurs de son temps, grâce notamment à un ton et un univers unique. Un monde où se croisent et s’entremêlent monstres et merveilles, récits modestes et grandes histoires. Un monde ancré dans les racines du conte, mais qui cache une obsession bien plus intime du réalisateur méxicain.
Une histoire orale de l’humanité
Si je vous dis que Guillermo del Toro a une affinité pour le conte, ça ne risque pas de vous faire tomber de votre chaise. Ce type de récit de faits imaginaires est présent de manière quasi-systématique dans toutes les œuvres du cinéaste, à un degré ou un autre. Dès son premier long-métrage Cronos (1993), la structure est déjà là, et le film s’ouvre avec une voix-off et une formule typique de ce genre de récit : “En 1536, fuyant l’Inquisition, l’alchimiste Uberto Fulcanelli…”. Idem pour L’Échine du Diable (2001), Hellboy (2004) et Crimson Peak (2015). Toujours cette même voix-off, posant un cadre, des personnages, un récit, une histoire antérieure. En regardant à la suite les ouvertures des films de del Toro, le constat est flagrant, et ce gimmick d’une narration introductive apparaît comme une véritable marque de fabrique du cinéaste.
Si elle ne sert parfois qu’à recontextualiser les enjeux du film (Pacific Rim, 2010), ou les événements de l’opus précédent (Blade 2, 2002), cette voix est avant tout celle d’un conte qui nous embarquant dans un récit merveilleux. Ainsi, Le Labyrinthe de Pan s’ouvre littéralement avec la voix de Federico Lucci prononçant les mots suivants, peu éloignés de Grimm et Perrault : “Voici longtemps, très longtemps, dans le Monde des Abîmes, là où n’existent ni le mensonge, ni la douleur, vivait une princesse qui rêvait au monde des humains”.
Dans Hellboy 2 (2008) John Hurt s’installe même dans la posture d’un véritable conteur, livre à la main, alors qu’il tente d’endormir son jeune protégé, quand au début de La Forme de l’Eau (2017), c’est un Richard Jenkins hésitant qui réfléchit à ce qu’il pourrait bien nous raconter. Mais si le conte irrigue le cinéma de del Toro, il raconte quelque chose de plus profond sur l’histoire orale de l’humanité, et la transmission entre générations.
Hommage au père
En y regardant de plus près, une autre figure fascine Guillermo del Toro : celle du père, faillible, humain et imparfait. Federico Luppi dans L’Échine du diable, John Hurt dans Hellboy, Geppetto dans Pinocchio (2022)... À travers cet archétype, Guillermo del Toro évoque son propre père, Federico del Toro, qui est l’un des initiateurs de la passion cinématographique du réalisateur.
À l’âge de huit ans, c’est ainsi des mains de son père que le jeune Guillermo reçoit une caméra Super-8, qui va lui permettre de faire ses premiers films amateurs, et d’embrasser une passion pour le cinéma qui ne s’éteindra jamais. C’est ce même père qui, pendant la production de Mimic en 1997, se retrouve kidnappé dans la ville de Guadalajara, avec une rançon d’un million de dollars demandée pour sa libération. La famille n’ayant pas les moyens de payer, c’est finalement le réalisateur James Cameron, ami de del Toro, qui fournira l’argent et permettra la libération du patriarche, 72 jours après son enlèvement. Un événement traumatique qui a renforcé ce lien déjà unique entre Guillermo et Federico, entre le père et le fils.
Les pères, les conteurs, les passeurs
À la lumière de cette relation, il semble évident qu’au-delà du conte, c’est le thème de la transmission même qui passionne Guillermo del Toro. La transmission du savoir, de la curiosité, de l’Histoire, mais aussi de la peur et des aspects moins glorieux de l’être humain. Par celà, del Toro raconte en creux une histoire de l’Humanité, qui existe surtout par les contes qu’elles se racontent, et les leçons qu’elle peut en tirer. Des histoires qui évoluent et se nourrissent de ceux qui les partagent, et des époques qu’elles traversent, pour mieux éclairer la nôtre. Comme c’est le cas de son dernier film Pinocchio, le 9 décembre sur Netflix, qui adapte le roman de Carlo Collodi de 1881 pour mieux le placer dans l’Italie faciste des années 1930… et en dire beaucoup sur les montées des extrêmes politiques dans notre époque contemporaine. Ainsi, à mettre en avant les pères, les conteurs et les passeurs de ce monde, Guillermo del Toro s’est imposé avec le temps et malgré lui comme l’un d’eux, et comme l’un des cinéastes les plus passionnants et importants de son temps.
Par Thibaud Gomès-Léal
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