Kneecap : un vent de rébellion sur un air de rap

Date de publication : 20.06.25

Récompensé dans plusieurs festivals dont Sundance et choisi pour représenter l’Irlande aux Oscars, le film Kneecap raconte à la fois un phénomène musical et un combat culturel. Entre fiction et réalité, ce long-métrage du cinéaste anglo-irlandais Rich Peppiatt, retrace l’ascension du groupe de rap Kneecap, qui a la particularité de performer en langue irlandaise. Quand un trio provocateur devient la figure de proue d’un mouvement de rébellion, cela fait des étincelles : retour sur un film à l’énergie euphorisante.

Célébrer et sauver le gaélique

Dans les premières minutes du film, l’annonce est claire : Kneecap va prendre le contre-pied de la majorité des films sur Belfast et sur l’Irlande du Nord. Plutôt que de mettre l’accent sur des émeutes violentes ou des décors urbains ravagés, Rich Peppiatt met en images le combat d’une jeunesse en ébullition comme une célébration. Pensé comme une sorte de collage, le film mêle un contexte historique et une réalité actuelle à une fiction aussi pop qu’irrévérencieuse. On y suit les débuts et l’ascension du trio Kneecap, de la rencontre entre deux apprentis rappeurs à Belfast (Móglaí Bap et Mo Chara) et un professeur de musique (qui deviendra DJ Próvaí), à l’écriture de leurs textes en gaélique irlandais et à leurs concerts survoltés.

À l’image du groupe, le film Kneecap ne fait pas dans la dentelle : les dialogues crus, le montage nerveux et l’humour insolent se mêlent pour former un véritable chaos narratif. D’autre part, à l’instar du trio, au-delà de la provocation, le film possède aussi une dimension politique assumée. En effet, Kneecap contextualise les relations entre l’Irlande du Nord et la Grande-Bretagne et aborde l’importance de sauver la langue irlandaise, tout en mettant en lumière une jeunesse en quête de liberté. En développant un propos puissant à travers une mise en scène audacieuse, Rich Peppiatt atteint une authenticité rafraîchissante, très éloignée de ce que proposent la plupart des biopics musicaux.

© Copyright Wayna Pitch

Entre biopic et mise en abyme

Alors que les biopics se multiplient au cinéma ces dernières années, Kneecap se démarque en allant à l’encontre des standards narratifs du genre. Rich Peppiatt a d’ailleurs confié sa volonté de réinventer ce genre cinématographique dans un entretien publié dans le dossier de presse consacré au film : « Plutôt que de regarder la carrière d'un groupe musical avec des lunettes roses, je me demandais s'il était possible de suivre l'ascension d'un groupe local presque en temps réel. » Formé en 2017, le trio Kneecap est plutôt jeune, mais déjà très populaire en Irlande. Le long-métrage constitue donc un terrain de jeu intéressant pour raconter leurs débuts artistiques, tout en s’inscrivant dans la continuité de leurs engagements et en s’adressant à un large public. Mo Chara, Móglaí Bap et DJ Próvaí, les trois membres du groupe, jouent leurs propres rôles à l’écran, aux côtés notamment de Michael Fassbender, et apportent une énergie brute au projet.

En trouvant un équilibre entre la pure fiction et l’actualité dans laquelle il inscrit son récit, Rich Peppiatt nous propose un film aussi vibrant que divertissant. En plus de réussir à véhiculer une énergie semblable à celle d’un concert à travers l’écran, Kneecap célèbre, avec force, une culture et une langue qui risquent de disparaître. Sans prétendre avoir toutes les réponses aux questions qu’il soulève, le film permettra sans doute de sensibiliser un nouveau public à l’histoire de l’Irlande du Nord, tout en rappelant, une fois de plus, la puissance de l’art.

 

Marie Serale | @marie_srl

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