Presence : adolescence hantée

Presence - Peter Andrews © The Spectral Spirit Company
Date de publication : 14.02.25
Récompensé de la Palme d’or en 1989 pour Sexe, Mensonges et Vidéo, alors qu’il était âgé de 26 ans, Steven Soderbergh a développé, au fil des années, une filmographie très éclectique. En ce début d’année 2025, il fait son grand retour dans les salles de cinéma françaises avec Presence, un intrigant film de fantôme écrit par David Koepp, scénariste à l’origine de multiples succès tels que Jurassic Park de Steven Spielberg ou encore Panic Room de David Fincher.

L’âme de la maison

Énigmatiques et imprévisibles, les fantômes nous fascinent autant qu’ils nous angoissent et la question de leur existence a été largement explorée dans la fiction. Ces apparitions surnaturelles sont souvent évoquées comme les âmes de personnes décédées qui auraient quelque chose à résoudre dans leur vie passée, avant de pouvoir accéder à l’au-delà. C’est, en tout cas, autour de cette croyance plutôt répandue que se construit Presence. Cependant, le film a la particularité de raconter l’histoire du point de vue du fantôme. Ainsi, la caméra, qui semble flotter, nous montre le champ de vision d’une âme qui erre dans une maison, sans pouvoir la quitter.

Presence - Peter Andrews © The Spectral Spirit Company

En donnant à voir les existences successives de plusieurs générations à travers une caméra fixe (et de nombreux effets visuels) dans son film Here (2024), Robert Zemeckis questionnait notre rapport au temps qui passe, mais aussi à la maison. On dit que certains lieux ont une âme : dans Presence, le fantôme est lié à la maison qu’habitent Rebekah (Lucy Liu), Chris (Chris Sullivan) et leurs enfants Chloe (Callina Liang) et Tyler (Eddy Maday). Cette maison, dans laquelle ils emménagent au début du film, est à la fois le théâtre d’un quotidien ordinaire, mais aussi le témoin de souffrances latentes. Guidés par le regard spectral de la « présence », nous découvrons peu à peu que la dimension horrifique du récit n’est pas liée à son aspect paranormal.

Le quotidien dans l’ombre du drame

Il n’y a pas de fantôme malveillant, ni de jumpscare dans Presence. Dès le début du film, la musique profondément mélancolique de Zack Ryan parvient à nous faire deviner que le fantôme invisible ne sera pas terrifiant. Rappelant le monstre que beaucoup d’enfants imaginent se cacher sous leur lit ou dans leur armoire, la « présence » trouve refuge dans le placard de la chambre de Chloe, comme seul répit dans son errance. La jeune fille est la seule à croire à la présence d'un fantôme dans la maison, ce qui lui vaut les moqueries de son frère. Pourrait-il s’agir du fantôme de sa meilleure amie, Nadia, récemment décédée ? Inquiets, les parents de Chloé semblent vouloir protéger leur fille d’elle-même, en envisageant de lui faire subir un test de dépistage de drogue. Pourtant, si un élément toxique menace Chloe, il s’agit plutôt d’un personnage extérieur.

Presence - Peter Andrews © The Spectral Spirit Company

Presence donne à voir le quotidien d’une famille hantée par des drames passés, des névroses adolescentes destructrices et des deuils silencieux. À la fin du film, ce n'est pas sa dimension surnaturelle, mise en scène avec élégance, mais expliquée dans un ultime rebondissement peu subtil, qui nous hante. Ce qu’il nous reste après le visionnage, c’est plutôt cette histoire familiale, sur laquelle pèse une tristesse déchirante.

 

Marie Serale | @marie_srl

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